V Glandouille La Serena

Après un couchsurfing avec un sommelier qui me fait découvrir les vins chiliens mais qui s'endort avec de la techno à fond dans la maison jusqu'à 6h du matin je continue mon ascension vers le nord du chili avec 8h de bus pour aller à La Serena. Une jolie petite ville au bord de la mer avec des maisons style coloniale. C'est très tranquille et très apaisant. C'est la petite ville de bord de mer, blindée de vacanciers durant les vacances d'été (décembre février) mais beaucoup plus zen quand j'arrive puisque c'est la rentrée des classes !
Je me retrouve dans une auberge où je suis la seule dans le dortoir (très rare mais quel luxe!!!).

L'histoire suivante m'a bouleversée , émerveillée, portée et me porte encore.

Ce soir-là, j'ai une faim de loup mais j'ai pas envie de rester avec les voyageurs alors je pars en quête d'un petit resto où je ne croise que des chiliens.
J'atterris dans un petit restaurant avec un menu entier pour 3000 pesos (4 euros). Et quel menu !
Une soupe locale avec patate, patate douce, maïs, courge, viande ( c'est juste l'entrée) puis un énorme poisson frit entouré de crudités.
En attendant mon festin je fais un point sur mes finances car j'ai très envie d'aller à Punta de Chorros, un village à 1h de la Serena dans lequel on peut aller voir des îles où vivent manchots, phoques, éléphants de mer, dauphins, baleines...le truc qui fait rêver ! Le problème c'est qu'il faut prendre un bus touristique pour y aller et c'est trop cher pour moi... Dans mon guide " L'art de voyager seule quand on est une femme" mon regard se fixe sur cette phrase : " Faites vous confiance! Si vous avez envie de visiter un endroit vous trouverez toujours une solution pour y aller !"

Pas le temps de réfléchir le repas est là et comme j'ai trèèès faim j'engloutis le tout sous le regard ahuri d'un chilien qui n'arrive pas à terminer son menu.
Il me demande si je mange comme ça tous les jours et comment un si petit corps peut consommer autant alors que lui mesure 1m90 et n'arrive pas à finir son entrée. La discution commence, je l'invite à ma table. Nous parlons de mon voyage et je lui demande quel est son travail...j'ai du mal à cacher mon sourire lorsque j'apprends qu'il vient à la Serena pour 2 jours car il travaille dans l'enseignement à la préservation de l'environnement à ...Punta de Chorros!!! YESSSSS ! Mais je reste calme et j'attends une proposition...À force de parler chasse, pêche et traditions tout en essayant de lui faire mes  meilleures imitations d'oiseaux (je savais pas les noms en espagnol...en tout cas ça l'a fait rire!) il me dit : "je crois que c'est ton jour de chance car demain je vais à Punta de Chorros. Si tu veux je t'emmène, te dépose au bateau et te ramène le soir". À l'intérieur de moi ça crie "OUIIIII" et puis une autre partie de moi me dit "tu le connais pas, il est peut être malveillant, attention...peur peur peur!!!".
Il sent ma peur et me dit : " Tu sais que je pars à 7h30. Si je ne te vois pas en bas de mon hôtel c'est que tu ne viens pas."
Je m'endors dans un état mitigé entre mon envie et ma peur. Comment savoir? Comment sentir ? Comment me faire confiance?.
La nuit portant conseil je décide de me fier au ressenti que j'aurai lorsque je me réveillerai. Je dors super bien et je me réveille en forme mais...toujours cette peur. Dans la cuisine de l'auberge il n'y a pas de couteau qui coupe alors pour me rassurer j'embarque une fourchette (ouai je sais mais je peux toujours la lui planter dans les yeux ou sur la cuisse ahahaha) et je me pointe à 7h30 pétante en bas de son hôtel.
Lorsque nos regards se rencontrent, nous sommes tous les deux surpris : Il ne s'attendait pas à ce que je vienne et quand à moi je me rends compte que "merrrrde j'ai oublié la fourchette ! ". Mais une petite voix me dit :"Bah oui! Si c'était vraiment risqué pour toi tu l'aurais pas oublié!". Ah ouaiiii trop cool j'adore ce genre de signe qui (personnellement) me rassure.
"Un abrazo" plus tard j'embarque dans la voiture de Ricardo pour 1h de trajet à travers les montagnes.
Magnifique. J'ai pu voir mes premières "vicuña" (vigogne) et "zorro" (renards) du Chili avant d'arriver à Punta de Chorros. Il m'accompagne pour prendre le bateau avant d'aller travailler et quelle chance encore ! Nous sommes lundi, c'est la rentrée des classes et les bus touristiques viennent du temps de midi pour visiter! Quel luxe je suis sur un mini bateau de pêcheurs avec 5 chiliens et 3 argentins à bord pour faire le tour des îles !
Le spectacle est au rdv. Encore une fois je verse ma larme de gratitude, de joie, pour le tableau qui se dresse sous mes yeux. Pélicans, manchots, phoques, éléphant de mer, des centaines d'oiseaux et d'autres espèces vivent sur ces îles. Évidemment, afin de respecter la faune et la flore nous ne pouvons accéder qu'à une seule des 3 îles sur laquelle les animaux n'ont pas élu résidence.
Pour conclure, un groupe de dauphins nous encerclent et s'amusent à faire la course avec le bateau.

Après toutes ces émotions ben...j'ai faim! Et je suis attendue comme une reine par Ricardo qui ne veut pas que je meurs de faim et m'emmène dans un super restaurant pour me faire goûter des tas de fruits de mer (dont je ne me rappelle pas les noms) et plats typiques de la région.
C'est avec le ventre plein qu'il me fait rencontrer tous les gens du village avec qui on papote pendant un moment. Nous rentrons à La Serena avec le coucher de soleil sur les montagnes.

En échange de cette journée incroyable je lui propose une séance de somatopathie. Suite à cela il tient à m'offrir également le repas du soir car malgré les difficultés à expliquer la somatopathie en espagnol il a parfaitement compris ce que cela pouvait engendrer dans sa vie. Donc il faut fêter ça! Et je n'ai pas le choix c'est cadeau! Je réalise qu'au-delà de cet échange, de cette rencontre, Ricardo m'apprend bien plus qu'il ne le croit. Il m'enseigne (comme tant d'autres depuis ces derniers mois) l'art de recevoir.
Recevoir est,pour moi, une grande marque d'humilité. Recevoir sans me sentir coupable, sans tenir à "rembourser" par tous les moyens ce qui m'est offert, sans pensées parasites...Humilité car je crois qu'une partie de moi n'accepte pas que quelqu'un puisse m'offrir quelque chose que je n'ai pas eu par moi-même. Humilité car j'accepte que l'autre puisse m'aider et qu'en plus il est super heureux de le faire!!!!!
Évidemment je suis invitée à sa maison de Valparaiso pour soigner toute sa famille en échange de l'hébergement, la nourriture gratuite et l'assurance d'être accueillie comme une reine!!!!!
Mais je souhaite aller vers le nord et c'est avec un immense abrazo que je salue cet ange, âme bienveillante et généreuse qui est venu sur mon chemin .
Je réalise aussi que chaque rencontre est juste, comme programmée, car chacun à quelque chose à recevoir de l'autre. Ainsi, je m'endors l'esprit tranquille en souhaitant qu'à cet instant mon énergie remplie d'amour et de reconnaissance puisse apporter sa goutte positive dans notre océan d'émotions humaines.

maison typique